Designer en tant que développeur ?

Designer en tant que développeur ? (le 24 décembre 2015)

Je profite de la sortie en vidéo de la chouette intervention de Marie Guillaumet à Paris Web 2015 « Design de soi : valoriser son identité et son expertise sur le web » pour rebondir sur les questions posées en fin de cette vidéo. Je vous conseille de voir absolument cette vidéo !

Comment faire quand on n’est pas graphiste/designer/etc. ?

La première chose, sauf si vous êtes un pur de dur qui ne fait que de l’assembleur et qui n’a pas vu un être humain depuis sa plus tendre enfance parmi les loups et autres sta et bne (des commandes d’assembleur), c’est déjà de vous dire que vous ne partez pas de zéro. Jusqu’à preuve du contraire, vous êtes capable d’exprimer un sentiment, un objectif, une envie, etc. !

Certes, je sais bricoler sous Photoshop, mais pour tout dire, je suis « un benêt à deux mains gauches dans le même sabot droit » quand il s’agit de concevoir un design from scratch sous Photoshop ou Illustrator, et j’imagine que je ne dois pas être le seul développeur/intégrateur dans ce cas.

La seconde chose, c’est d’arrêter de voir les personnes étranges qui manipulent Photoshop/Illustrator comme des artistes (sous-entendu : perchés, qui carburent à la coke, déconnectés de la réalité) et de les voir comme des designers. Si si. J’entends par là qu’ils ne sont pas là pour faire ce qu’ils veulent mais ce dont vous avez besoin : ils vont écouter votre besoin, votre envie, votre intention, etc. et ils vont devoir traduire ça en terme d’identité graphique, univers, etc. C’est même un bon moyen de différencier des doux planeurs de vrais designers.

La troisième chose, c’est de ne surtout pas être gêné d’utiliser un designer. D’ailleurs, vous n’utilisez pas cette personne (sauf si vous l’avez enfermé dans une cave et que vous le nourrissez de bouts de rats), vous utilisez ses compétences. On peut tourner le problème comme on veut, mais à un moment, il faut reconnaitre que c’est un métier et point barre.

Même si :

  • en bon curieux, je lis plein de choses sur le sujet ;
  • mon métier me fait beaucoup travailler avec (je traduis des designs en responsive) ;
  • à force de travailler avec mon graphiste, je choppe certains de ses réflexes (Aère ! Cherche des alignements ! Etc.) ;
  • et finalement, je suis même capable de dire si un design est réussi ou pas.

Hé bien, je reste bien incapable d’en pondre un, techniquement parlant. C’est normal, ce n’est pas ma spécialité, ce n’est pas mon métier.

Pour vous donner un exemple, prenons le site de Röcssti, et entrons dans le processus créatif.

La conception du design de Röcssti

Au tout début, j’avais fait une petite page toute bête avec quelques blocs, et un logo improvisé vite fait. Vous pouvez voir l’ancienne page sur WayBack machine . Ce n’est pas honteux, pour la bonne et simple raison que c’était un tout petit projet personnel pour lequel je n’avais pas prévu de faire plus.

Donc mes maigres compétences étaient largement suffisantes pour mon besoin : permettre que les gens lisent une page.

S’est trouvé que là où je travaille, mon graphiste de l’époque était d’accord de me pondre un design (logo plus site). Et j’avais envie de donner un plus bel écrin à ce projet personnel.

Avant même qu’il ne commence quoi que ce soit, mes intentions étaient les suivantes, voici exactement ce que je lui ai dit :

  • Jouer à 600% la carte Swiss-made, Swiss-quality (avec un nom tel que Röcssti, on assume totalement)
  • Quelque chose de chaleureux, surtout pas de page froide, technologique et glaciale (on doit se sentir dans un châlet Suisse)
  • On ne se prend pas au sérieux !
  • Et l’intégration en responsive est souvent vu comme quelque chose de compliqué, donc je veux donner une intention globale de simplicité et de facilité. Il faut que cela rassure.

Vous voyez, pas besoin d’être designer au sens strict pour donner une ou des intention(s). Et selon moi, c’est capital que vous le fassiez ! Mettez vos valeurs, vos envies, etc. sur la table !

Du coup, on s’est posé la question suivante : dans l’imaginaire collectif, à quoi pense-t-on quand on parle de Suisse ? Le chocolat, le drapeau, l’edelweiss, le fromage, les montagnes, les montres, les prés verdoyants, la qualité, etc.

La première chose à venir fut le logo, dans une forme très proche de la version finale. Faire un logo est quelque chose de très difficile pour moi, mon graphiste l’a posé bien plus vite, bien mieux et bien plus efficacement que ce que j’aurais jamais pu faire.

Une première maquette (que je n’ai malheureusement pas retrouvée) était avec une jolie montagne, façon là-hauuuuuuuuuuuut sur la montagneuuuuuuuuuuuuu. L’idée était sympa et le côté micro-framework des montagnes fonctionnait bien. Toutefois, le graphiste n’était pas complètement satisfait.

Une seconde maquette donnait ceci.

Une maquette du site Röcssti

On était déjà très proches du résultat final. Bref, quelques retouches après, le design global fut posé. Grosso modo, on l’a juste simplifié afin de ne pas non plus en faire des gigatonnes. On avait eu des idées délirantes comme animer le bandeau, etc. mais on a fait le tri.

Le design ne s’arrête pas au « graphisme »

En gros, ça y est, j’ai un bon début d’univers graphique. Mais il y a encore beaucoup de travail, et c’est là que – même si je ne suis pas designer au sens strict – je vais quand même fortement participer à ce processus de design. Si si, un développeur peut être créatif.

Le contenu et sa mise en forme via CSS est une solide étape. En voici quelques exemples.

Typiquement, les boutons CTA ont une cohérence : flèche fine pour le téléchargement, triangle pour les liens, flèche de sortie pour les liens externes.

Le travail typographique est important aussi : faire une esquisse de rythme vertical, respecter les conventions micro-typographiques selon la langue (c’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup), c’est du travail de design. La typographie, c’est quand même très important sur le web.

Aérer tout cela, faire des boutons suffisamment gros qui donnent envie de cliquer, pondre des contenus aussi attrayants que possible, faire marcher le tout en responsive, etc. c’est aussi du design et de la conception.

La vache que vous avez vu sur les premiers designs a été réutilisée pour la page d’erreur 404 par exemple, en clin d’oeil pour mon graphiste qui adorait cette vache.

Et une de mes intentions était de ne pas se prendre au sérieux. Les 42 Röcssti-quotes, le Konami code, les vannes comme le bouton pour générer un build, les bêtises dans les nouvelles en-dessous de la date, les sottises dans les crédits, etc. On est bien d’accord, ce sont peut-être des détails, mais cela participe à l’intention de base du site. Je ne peux pas envisager Röcssti sans ce côté sympathique, je laisse les pages glacées aux super-frameworks.

C’est un parti pris, qui peut totalement déplaire, mais c’est ainsi que je veux le définir.

En conclusion

N’ayez pas peur de vous servir des compétences d’un designer. Je le redis, il n’y a aucune honte à aller chercher des compétences que vous n’avez pas. Reconnaitre ses incompétences, c’est déjà faire preuve de sagesse. Personnellement, je suis peut-être pas mauvais pour responsiver un design mais je suis totalement incapable de pondre un logo (même si je peux dire si un logo est bon ou pas) ou un graphisme (idem). C’est comme ça, c’est pas grave.

Il ne va pas parler de vous à votre place, il va juste vous aider à mieux le faire. Regardez la page de départ de Röcssti et le site actuel, c’est dur de ne pas dire que c’est mieux maintenant.

Je suis d’ailleurs en train de faire le même chemin pour ce site personnel, qui va subir un lifting profond, aussi vite que possible. Encore une fois, le processus créatif est le même : les intentions, se définir, etc. On a déjà le logo, le design suivra. Mon graphiste a d’ailleurs adoré que je donne des intentions, et du coup, il s’amuse plutôt bien à créer un petit univers autour de tout cela, qui va être radicalement différent de celui de Röcssti.

Ne dites plus : je ne sais pas. Vous êtes capables d’exprimer des émotions et des intentions. Vous êtes capables de vous définir (même si c’est pas toujours facile) ou de définir quelque chose. Croyez-moi, définir un univers pour une « marque » (aussi humble soit-elle comme celle de Röcssti), c’est super sympa.

J’adore cet exercice pour ma part… et il n’y a aucune raison que vous en soyez incapable.

Joyeux Noël !

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Cet article a été écrit par Nicolas Hoffmann.

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