Un point me surprend beaucoup dans le débat sur la loi sur le renseignement, c’est l’argument « je n’ai rien à cacher donc je m’en fous de cette loi ».
Le début de cette phrase est incomplet, il faut entendre : je n’ai rien à cacher… de répréhensible.
Comme toute personne somme toute « normale » : je n’ai jamais commis de crime, je n’ai jamais agressé une femme ou qui que ce soit, je n’ai pas vendu de drogue, je paie mes impôts, etc.
Donc effectivement, au regard de la loi, je n’ai rien à cacher. Si, comme une voisine le prétendait (une vieille un peu folle là où j’habitais avant), on m’accusait de faire du feu dans mon appartement et (sic) de faire brûler ladite voisine (oui, elle était vraiment dingue), et qu’un gendarme était missionné pour vérifier ces faits, effectivement, je n’ai rien à cacher à la justice, et je lui ferai vérifier de suite que je ne fous pas le feu au lotissement (s’il était besoin de le vérifier…).
Néanmoins, le fait que je n’aie rien à cacher de répréhensible n’implique pas que je souhaite que toute ma vie (privée) soit étalée ou même stockée.
Imaginons que mon truc, ce soit de faire l’amour déguisé en costume de loutre. En soi, même si ça peut être surprenant, ça n’a rien de répréhensible. Vous vous doutez bien que je ne souhaiterais pas que « ce petit plaisir » soit étalé quelque part, même fût-ce dans une boite noire !
Plus sérieusement, imaginons qu’un algorithme mal codé me mette sur surveillance, car j’ai fait une recherche sur le terrorisme. Impossible ? Il faut être fou ou incroyablement naïf pour croire qu’un algorithme n’est pas faillible (et c’est un développeur qui vous le dit). Imaginons que ce soit votre enfant qui fasse cette recherche, pour un exposé ou parce qu’il veut faire le malin devant ses copains.
Citons ce cher Benjamin Franklin :
Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre, et finit par perdre les deux.
Autre chose : reprenons l’exemple de la connerie de jeunesse. Qui me dit qu’à l’avenir, ces informations ne seront pas utilisées contre votre enfant ?
Même sans imaginer un truc complètement parano, imaginons qu’à la suite d’un énième scandale de factures de taxi avec de l’argent public, on dise que pour avoir un job en tant que fonctionnaire, il faille ne jamais avoir eu de « casier » dans une boite noire, parce qu’il faut des personnes au-dessus de tout soupçon. Et pourquoi pas ? Votre enfant serait donc emmerdé toute sa vie.
Pire, imaginons que ces boites noires soient piratées. Cela vous plairait que vos données soient entre les mains… de n’importe qui ?
Je crois sincèrement que les conséquences potentielles d’un tel système dépassent totalement ce pour quoi il a été imaginé (changements de gouvernance, lois futures, etc.). En mythologie, on appelle cela une boite de Pandore. Et il ne vaut mieux pas les ouvrir.
Ajoutons à cela que le système ne fait pas de différence entre un voleur de poules et un criminel. Et vous vous doutez bien que ce dernier saura comment ne pas se faire pincer, vous pouvez trouver en 5 minutes comment esquiver ces systèmes…
c'est mon coté testeur qui ressort sans doute, mais je vois déjà les testeurs se comporter comme un terroriste, jusqu'à implanter une bombe, pour voir s'ils se font détecter avant.