Quand j’ai commencé en tant que professionnel, un des principaux arguments massue sur lequel j’essayais de vendre mes connaissances/prestas était la possibilité de mettre à jour son site tout seul.
Rappelons qu’en 2003, les back-ends et autres CMS, même s’ils existaient déjà, étaient bien moins rentrés dans la culture des prestations Web qu’ils ne le sont devenus aujourd’hui.
Pour ma part, je faisais mes back-ends à la main, ils étaient simples mais ils suffisaient aux besoins des clients, étant faits sur mesure. Mon précédent boss était le premier à vendre cette approche, en étant le premier bénéficiaire à travers l’intranet de la boîte et divers projets, qui selon sa formule « se pilotaient tout seuls ».
Curieusement, le front-end n’avait pas l’importance qu’il a aujourd’hui. La seule demande que j’avais, c’était « faut que ça s’affiche bien », comprenez sous IE6, et si vraiment on avait un client connaisseur, sous Firefox/Opera.
Le soin que j’apportais à mes intégrations et au front-end dépassait souvent largement ce qu’on attendait de ma part. On me demandait souvent de plus discuter mises à jour des sites plutôt que de leur capacité à bien s’afficher.
Curiosité : c’est quand même extraordinaire que ce qui ait longtemps été mis en avant sur les sites… c’était l’arrière-boutique.
J’ai toujours été convaincu que c’était important d’avoir des intégrations propres et bien bichonnées, mais j’ai longtemps cru que le soin que j’y mettais était de la surqualité d’intégrateur pointilleux, en tout cas vu comme tel. Parallèlement à cela, mes back-ends étant volontairement simples, me permettaient d’en faire sortir les données très facilement, de manière à ce que les contraintes du back-end ne viennent jamais dicter comment devaient être mes intégrations (et même les soutenir si besoin était).
Dix ans après, le front-end a (re-)pris la place que l’on sait : performances, web mobile, responsive, et même web adaptatif. Les conférences et les articles confirment cet intérêt.
Si on me demande toujours des back-ends sur mesure, le front-end est vraiment devenu l’objet de toutes les attentions : il faut que ça soit rapide, bien rendu, scalable comme on dit en anglais, souple, adaptable selon les supports via le côté responsive, etc.
La curiosité d’il y a dix ans est enfin ré-équilibrée si j’ose dire : enfin on se soucie de l’avant-boutique. Ajoutons à cela que l’avant-boutique est juste ce qui est montré à la Terre entière (je ne parle même pas de design), je ne sais pas pour vous, mais moi je trouve ça extra-ordinaire : enfin on se soucie de ce qui est montré au visiteur !
Oui, s’intéresser au front-end, c’est ça : c’est se soucier de ce qui est montré à la face du monde en matière de sites web. Autrement dit, quand vous intégrez un site, pensez que vous avez la responsabilité de ce qui va être montré au monde entier. Si jamais quelqu’un minimise votre responsabilité, envoyez ce que je viens de mettre en gras à la tronche de ce quelqu’un.
Et à titre personnel, comme aurait pu dire monsieur Jourdain : depuis des années, je faisais du front-end first sans le savoir.
En 2003, je commençais pour ma part en tant qu'amateur, en créant mes premières pages web avec un soft, dont, quelques années plus tard, j'ai appris à reconsidérer l'usage quand j'ai entendu parler de qualité web pour la première fois.
Vient ensuite la découverte de GuppY, un CMS 'sans' BDD, puis mes débuts avec le PHP et dans la foulée la découverte du monde de l'open source.
Je n'avais jamais fait ce constat de l'importance consacrée au back-* à cette époque, jeune age et manque de recul oblige, mais je me suis plusieurs fois retrouvé par la suite dans des situations où des CMS semblaient être des armes de destruction massives. Un besoin simple et une réponse sur-dimensionnée. Nombre de prestataires n'avaient qu'une ou à la rigueur 2 solutions sous la main, quelque soit le besoin.
Je pense que c'est aussi cette sorte de course au couteau suisse qui a contribué à complexifier le back-end, et à développer les efforts de ce côté.
Le front s'en est certainement trouvé négligé, et je pense que l'effet 'web 2.0' a joué également : on a enrichi l'expérience utilisateur encore et encore, jusqu'au moment où elle s'en trouve dégradée : le problème de performance, qu'on avait oublié, est arrivé.
La transition du 56k vers l'ADSL a peut être contribué à masquer le problème pendant un temps (de mémoire l'ADSL a commencé à pas mal se démocratiser aux alentours de 2001/2002 ?)
Oups, je crois que j'ai été emporté par la nostalgie !
Concluons donc : oui pour le front-end, encore et encore (et puisque je parlais de débit, rappelons qu'entre mi 2012 et mi 2013 le débit moyen mondial a augmenté de 10% alors que les pages web se sont alourdies de près de 40%).